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Wednesday, March 21, 2007

LES SPHERES DU CŒUR

"Ce texte doit encore moins être pris pour un manuel du type " faites-le vous-même ", à l'attention de ceux qui aspirent à pratiquer la discipline spirituelle et à atteindre la " Grande Perfection " décrite ici. Pour une telle pratique, le suivi personnel d'un lama qualifié et expérimenté est absolument indispensable. Ceux qui souhaitent expérimenter par eux-mêmes peuvent être assurés que leurs expériences mentales, quelles qu'elles soient, seront soit déroutantes, soit - et le danger est réel - destructrices. "
A cette mise en garde de Per Kvaerne s’ajoute les mots d’un hiérarque tibétain inquiétant. En effet, Shenphen Dawa menace de mort les imprudents qui étudient le Dzogchen sans se faire racketter par un gourou : " Ne serait-ce que de parler du Dzogchen, c’est en quelque sorte précipiter sa propre mort " (bulletin n°7, Urgyen Samyé Chöling, Dordogne).
La jaquette du livre devrait préciser : " MEDITER TUE ! ".

Un lama qualifié, c’est l’Arlésienne du Dharma.

Le pamphlet de Daniel Odier, " Le Grand Sommeil des éveillés ", proclame la fin de l’illusion du maître qualifié et pleinement éveillé :
" Nous sommes manipulés par des pseudo-sages qui arborent un éveil de pacotille collé à un ego surdimentionné. Ces illuminés prennent soin de nous faire glisser dans un système qui nous lie pieds et poings au devenir. Les jeunes loups-gourous s’éveillent en trois stages d’été et quittent leur emploi pour enseigner prématurément. Les vieux renards veillent au grain en appointant parcimonieusement des êtres plus médiocres qu’eux-mêmes pour être certains qu’on ne les oubliera pas. La plupart des scélérats qui font métier d’enseigner ne transmettent que leur propre désarroi pour continuer à gagner leur vie et satisfaire leur ambition.
Où se situe le mensonge ? La plupart ne connaissent pas l’état dont ils parlent et ceux qui le connaissent le rigidifient avant de le restituer. Comme disait Lin-t’si, c’est " mettre dans sa bouche des morceaux de merde pour les recracher à d ‘autres ". Les religieux ne comprennent rien à l’être social, au désir, à la liberté. Les traditionalistes étouffent la tradition en la transmettant. Ceux qui enseignent ne révèlent pas le secret absolu, soit qu’ils l’ignorent soit qu’obsédés par un sens élitiste ils pensent que peu d’êtres méritent de recevoir l’enseignement le plus profond. "

Après ce réquisitoire, il n'est pas étonnant que le message fondamental contenu dans " Les Sphères du Cœur " échappe à la sagacité des lamas qualifiés. Ils ont édifié leur fond de commerce en enseignant les méthodes sophistiquées du "Chagtri", le texte de Dru Gyelwa Yungdrung. En réalité, dans " Les Sphères du Cœur ", Shardza Tashi Gyaltsen, comme Longchenpa et le Chan originel, récuse tous les artifices des méthodes méditatives en deux phrases : " Le texte du "Chagtri" (phyag khrid) par Dru gyel Yungdrung (Bru rgyal gyung drung) et ses disciples était accepté comme l’enseignement le plus élevé mais ce n’est pas le cas. Il ne peut pas plus être comparé à l’enseignement le plus élevé, que la terre ne peut l’être au ciel. " (" Les Sphères du Cœur ", page 52, Les Deux Océans, 1998.) On ne saurait être plus clair.

Jean-Luc Achard, docteur de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes et chercheur au Centre National de la Recherche Scientifique (ses travaux se concentrent sur les traditions Bönpo et Nyingma de la Grande Perfection), écrit au sujet du Chagtri qui présente la quintessence de toutes les instructions orales du Dzogchen du Zhangzhung Nyengyü :
" Son auteur, Dru Gyelwa Yundrung (le Vainqueur Eternel du clan Dru, 1242-1290), reçut la plupart de ces instructions auprès de son maître-racine Yangtön Densapa, et notamment toute l’histoire des maîtres de la Transmission. Celui-ci insista grandement sur le sceaux de secret appliqués au cycle du Zhangzhung Nyengyü, ainsi que sur l’impératif de sa transmission unique (gcig rgyud), c’est-à-dire d’un maître à un seul disciple. Certains éléments suggèrent que la brièveté de la vie de Gyelwa Yungdrung (mort à l’âge de 48 ans) serait due à la rédaction et la divulgation de ses Instructions qui étaient protégées par les gardiens de l’enseignement. "

Les chercheurs du CNRS vivent dangereusement en traduisant les textes placés sous la vigilance de gardiens tueurs invisibles, les sbires démoniaques des lamas.

Tuesday, March 20, 2007

LE CŒUR DANS LE DZOGCHEN

" C’est le cœur qui donne naissance à toute connaissance ". Cette croyance de l’Egypte antique est partagée par les grandes traditions spirituelles. Ramana Maharshi, un sage Indien, parle du cœur spirituel qui dans l’homme est la source de l’ultime vérité : " Le cosmos tout entier est contenu dans un petit point minuscule qui se trouve dans le Cœur. Ce petit point est normalement fermé, mais il s’ouvre sous l’action de vichara (la quête intérieure) ".
Dans la Bible, le cœur est l’être intérieur car Dieu regarde dans le cœur (Premier Livre de Samuel XVI, 7).
L’Islam considère que c’est dans le cœur que résident la spiritualité et la contemplation. Jasmin, chap. VII, §§ 98-101, en exégèse du célèbre " verset de la Lumière " (Äyat al-Nûr, 24 : 35), comme typifiant les voiles des théophanies. Cf. Glose 69 : " Nécessairement c’est dans l’Intelligence initiale (le Noûs) que sous les attributs de la grâce et de la beauté s’accomplit la théophanie primordiale ; puis l’Intelligence s’épiphanise dans l’Esprit, l’Esprit dans le Cœur, et à partir de la Niche du Cœur la lumière en est projetée dans le monde de la Nature. "
Dans la tradition Dzogchen, la base primordiale (kun-gzhi), l’état naturel (gshis kyi gnas-lugs), est la source du Samsâra et du Nirvâna. La Base Primordiale est omniprésente mais elle se trouve plus particulièrement dans le cœur humain, dans un petit espace nommé " la tente brune des cornalines ". L’enseignement Dzogchen du maître Bönpo Shardza Tashi Gyaltsen précise qu’au niveau du cœur partent quatre canaux spirituels :
Le " grand canal doré " (ka ti gser gyi rtsa chen) relie directement le cœur au canal central.
Le " filament de soie blanche " (dar dkar snal ma) commence au niveau du cœur dans le canal central et remonte le long de la colonne vertébrale.
Le troisième canal, le " filament finement enroulé " (phra la ‘khrul) prend également sa source au niveau du cœur.
Le quatrième, la " voie cristalline " (shel bug can) va directement du cœur aux yeux.
L’état naturel, la sagesse du Discernement (rig-pa’i ye-shes) se trouve donc au centre du cœur ; elle se déplace dans la " voie cristalline " qui aboutit aux yeux, la " porte d’eau du lointain lasso ".
La clarté de l’état naturel apparaît sous différentes formes lumineuses, des sphérules (thiglés), des filaments dorés et des visions diverses. Le texte " Les perles du cœur de Samantabhadra " (Künzang Thugtik) révélé par Chogyur Dechen Lingpa, traduit par Jean-Luc Achard, est accompagné d’illustrations détaillant une partie des visions du franchissement du pic (thogal). Les expériences visionnaires sont parfaitement codifiées et se démarquent des fantasmagories de l’imagination. Elles comprennent quatre étapes :
La vision de la réalité manifeste (vision de thiglés quinticolores, de damiers et d’interstices de filets ou de festons) ;
La vision de l’accroissement des expériences lumineuses (vision des chaînes adamantines du discernement) ;
La vision du paroxysme du discernement (vision de thiglés semblables à des ocelles de paon, de boucliers ou de cerclages concentriques…) ;
La vision de l’épuisement de la réalité (cette vision s’exprime dans un septuple étagement lumineux).


(Photo : SHERAB GYATSO, jeune moine Bönpo, a apprécié la basilique du Sacré-Cœur, dite du "Vœu principal", située au sommet de la butte Montmartre.)